Trois clichés sur le sous-titrage pour démêler le vrai du faux
- “Il n’y a qu’un seul type de sous-titrage.”
- “Le sous-titrage, c’est facile.”
- “Le sous-titrage, ce n’est que pour les personnes sourdes et malentendantes”
- De mon côté de la planète
“Il n'y a qu'un seul type de sous-titrage”
Ou ses variantes : “ma vidéo est accessible, elle est sous-titrée” ou “mes sous-titres sont normaux.”
Parmi les élèves à ma formation complète au sous-titrage, certains ont déjà fait des initiations ou des formations courtes au sous-titrage.
Quand on commence à parler technique, ils me disent : “Ah oui, en sous-titrage, on met les narrations en italique” ou “j’ai appris qu’on devait respecter 42 caractères maximum par ligne en sous-titrage”.
Sauf qu’en sous-titrage, on a bien sûr des grands principes, mais en termes de règles, tout va dépendre du type de sous-titrage que l’on doit effectuer.
On a en effet plusieurs types de sous-titrage selon le public à qui on s’adresse :
- Le sous-titrage VOST
Il est à destination des personnes entendantes qui ne comprennent pas la langue de la vidéo, c’est un sous-titrage “traduction”.
Exemple : un épisode de série en anglais sous-titré en français. On le voit partout : plateformes, télévision, cinéma, YouTube...
- Le sous-titrage SME
C’est le sous-titrage destiné aux personnes sourdes et malentendantes (SME) en France.
Il répond à des normes strictes qui suivent une charte et comporte des couleurs.
On le rencontre surtout à la télévision, où il est obligatoire pour la plupart des chaînes et sur certaines plateformes comme Arte. On peut aussi le voir au cinéma, lors de séances indiquées “VFST”.
- Le sous-titrage SDH
C’est le sous-titrage destiné aux personnes sourdes et malentendantes, mais qui suit les normes américaines. Il répond à des normes strictes comme le sous-titrage SME, mais elles sont très différentes.
On le rencontre sur les plateformes de streaming américaines, comme Netflix ou Amazon Prime.
- Le sous-titrage simple ou template
C’est un sous-titrage qui suit des normes basiques : il est destiné à être modifié. Soit les sous-titres seront ensuite traduits, soit ils seront transformés en sous-titres SME ou SDH.
Ils sont aussi parfois utilisés tels quels pour certaines vidéos éducatives (avec peu de plans et d’effets sonores).
- Le sous-titrage réseaux sociaux
Il est apparu avec l’essor des vidéos sur les réseaux sociaux et est souvent amateur : on voit souvent des sous-titres automatiques modifiés. Peu de normes sont appliquées, même si l’on devrait en appliquer pour garantir que son contenu soit accessible à tout le monde. Si le sujet vous intéresse, vous pouvez lire mon article à ce sujet.
Je vais donc corriger mes élèves ainsi : “Oui, en sous-titrage VOST, on met les narrations en italique, mais en sous-titrage SME par exemple, on les mettra en bleu” ou “c’est vrai, on respecte 42 caractères maximum par ligne en sous-titrage SDH, mais pas pour les autres types de sous-titrage.”
Donc si vous avez appliqué les normes VOST pour sous-titrer votre vidéo (ou pas de normes du tout), votre vidéo ne sera pas réellement accessible aux personnes sourdes et malentendantes.
Il n’y a également pas de sous-titrage “normal”, tout dépend du public pour qui on sous-titre et des techniques utilisées.
“Le sous-titrage, c’est facile.”
Ou sa variante : “il suffit de corriger des sous-titres automatiques et de maîtriser la grammaire et l’orthographe.”
Le sous-titrage, c’est comme tout, ça s’apprend et s’expérimente : ce n’est bien sûr pas réservé à une élite.
Mais la difficulté principale que rencontrent mes élèves qui débutent en sous-titrage, c’est qu’il y a beaucoup de choses à penser quand on sous-titre :
- Ne pas dépasser les caractères par ligne et par seconde maximum selon le type de sous-titrage
- Prendre en compte les changements de plan
- Positionner son sous-titre selon les titres à l’écran
- Avoir en tête les normes du sous-titrage que l’on réalise, qui changent pour chaque type de sous-titrage
- Savoir à quel endroit de la phrase on va découper le sous-titre
- Savoir bien synthétiser (ni trop ni trop peu)
- S’assurer que l’on a bien retranscrit le message
- Analyser ce qu’on entend : est-ce une voix-off, un narrateur interne, un personnage hors champ, d’où provient la voix… Et appliquer les bonnes règles
- Et bien sûr, s’assurer que nos sous-titres soient exempts de fautes de grammaire et d’orthographe
Certaines parties compliquées, avec beaucoup de changements de plan ou des locuteurs qui parlent vite par exemple, peuvent prendre beaucoup de temps et de réflexion à sous-titrer.
Donc je ne dirais pas que c’est extrêmement difficile, par contre le sous-titrage professionnel ne s’improvise pas. Trop de personnes en dépendent pour avoir accès aux vidéos !
Si vous souhaitez vous former au sous-titrage ou compléter votre formation, il me reste deux places pour la session de formation qui commence mi-septembre. Contactez-moi pour qu’on en discute ensemble. 💜
“Le sous-titrage, ce n’est que pour les personnes sourdes et malentendantes”
Ou sa variante : “Je n’ai pas besoin de sous-titrer mes vidéos car aucune personne sourde ne les regarde”
Comme on l’a vu, le sous-titrage permet aussi de traduire une vidéo vers une autre langue.
Même si le sous-titrage SDH, SME et réseaux sociaux accessible est pensé en priorité pour les personnes sourdes ou malentendantes, il est en fait utile à de nombreuses personnes !
85 % des utilisateurs et utilisatrices de Facebook regardent les vidéos sans le son, selon le magasine Digiday. Elles s’appuient donc sur le contenu textuel d’une vidéo pour en comprendre le contenu.
Regarder une vidéo avec les sous-titres et le son améliore la compréhension générale. C’est l’effet que les scientifiques appellent “les signaux redondants” (redundant signals effect). Ça veut dire que quand notre cerveau reçoit deux signaux équivalents (un son et un sous-titrage qui y correspond), il traite l’information indépendamment deux fois.
L’avantage ? On comprend mieux l’information et on la mémorise mieux ! Par contre, si les sous-titres sont de mauvaise qualité, cela crée une dissonance pour le cerveau qui pousse à arrêter de regarder le contenu.
Les sous-titres sont aussi lus par des robots ! Selon une étude menée par Discovery Digital networks, les algorithmes de Google et YouTube vont scanner les sous-titres externes (au format SRT ou VTT) uploadés par les YouTubers pour déterminer de quoi parle la vidéo et mieux la référencer sur les moteurs de recherche.
On l’a donc vu, le sous-titrage n’est pas que pour les personnes sourdes et malentendantes, mais j’aimerais revenir sur ce “que”.
Beaucoup de personnes ne réalisent pas qu’en fait, ce terme “sourd et malentendant” s’applique à une grande partie de la population française !
On dénombre entre 8 et 12 millions de personnes concernées en France. La surdité est dans de nombreux cas, mal ou pas diagnostiquée du tout, surtout après 65 ans, lorsqu’entendre moins bien est considéré comme “normal”.
C’est donc se priver de beaucoup de spectateurs et spectatrices potentiels que de ne pas proposer de sous-titrage accessible à ses vidéos.