Le sous-titrage SME

Le sous-titrage SME

Zoom sur ce sous-titrage encore méconnu mais de plus en plus présent

Je vois trop souvent encore des confusions quant aux différents types de sous-titrage, et notamment le sous-titrage Sourd et Malentendant, appelé aussi sous-titrage SME.

Alors dans cet article, je vous propose de vous plonger dans ce type de sous-titrage encore méconnu mais que l’on voit de plus en plus.

Sommaire :

  1. Définition du sous-titrage SME
  2. Ses particularités
  3. Comment faire du sous-titrage SME ?

Qu'est-ce que le sous-titrage SME ?

Définition

Quel est le public visé ?

Le sous-titrage SME, ou Sous-titrage Sourd et Malentendant, est comme son nom l’indique pensé en priorité pour les personnes concernées par la surdité et qui ont besoin des sous-titres pour comprendre un film, une série ou tout autre programme audiovisuel.

Il est aussi pensé pour les personnes dont la compréhension peut être empêchée : les personnes qui ne comprennent pas bien le français, les personnes qui ont des troubles de l’attention, sur le spectre autistique, une surdité passagère etc.

Il est différent du sous-titrage VOST, qui lui est à destination d’un public entendant qui ne comprend pas la langue source du programme. Par exemple, une personne qui ne parle pas anglais et qui veut regarder un film en anglais.

Il est aussi bien différent du sous-titrage que l’on voit souvent passer sur Internet ou sur les réseaux sociaux et qui est bien souvent un sous-titrage type habillage pour accrocher le regard mais qui n'est pas accessible aux personnes sourdes ou malentendantes.

Lire mon article sur le sujet (lien)

L’enjeu du sous-titrage SME est d’être de qualité et adapté pour les personnes qui en ont besoin afin de leur permettre d’accéder à leur programme en toute autonomie.

Et pour cela, il doit répondre à des normes.

Un sous-titrage conforme au RGAA

Dans le domaine de l’accessibilité, on aime bien s’appuyer sur des chiffres et des normes précises afin de ne pas se laisser avoir par sa propre perception des choses.

Par exemple, je suis une femme adulte qui entend bien, ce qui me permet de m’appuyer à la fois sur le texte des sous-titres et sur l’audio, et qui lit rapidement, comme je suis habituée. Je ne vais donc pas lire à la même vitesse qu’un enfant, qu’une personne sourde qui ne s’appuie pas sur les prises de parole sonores pour comprendre etc.

Je ne peux donc pas me faire une réflexion : “moi j’arrive à lire, ce qui sera le cas de mon public.”

C’est la même chose d’ailleurs pour d’autres plans liés à l’accessibilité : ce n’est pas parce que moi j’arrive à bien lire un texte écrit en jaune sur fond blanc (en plissant quand même un peu les yeux) que ce sera le cas pour la majorité de la population.

On aime donc bien s’appuyer sur des données chiffrées en accessibilité, et c’est le cas aussi du sous-titrage accessible, comme avec le calcul du nombre de caractères qui apparaissent à l’écran par seconde, par exemple.

Comme le sous-titrage SME est une solution d’accessibilité pour les personnes sourdes ou malentendantes, il est conforme au RGAA, ce qui ne sera pas le cas du sous-titrage VOST ou du sous-titrage type “habillage” que l’on rencontre parfois sur Internet.

Comme il est indiqué dans le RGAA : “Seule la présence et la pertinence d’un sous-titrage pour sourds et malentendants permet d’être conforme.”

Il est bien précisé la “pertinence” du sous-titrage, car ce n’est pas parce que des sous-titres sont faits qu’ils seront de qualité et donc pertinents pour notre public.

Un sous-titrage qui ne sera pas lu n’a aucun intérêt, et c’est tout l’enjeu de la qualité. C’est en ce sens qu’a été produite en 2011 la Charte relative à la qualité du sous-titrage à destination des personnes sourdes ou malentendantes, plus communément appelée la charte du sous-titrage SME.

Définition du sous-titrage dans le RGAA (lien)

Un sous-titrage normé par la loi : la Charte du sous-titrage Sourd et malentendant

L’obligation de sous-titrer tous les programmes des chaînes de télévision dont l'audience moyenne annuelle dépasse 2,5% de l'audience totale des services de télévision, ainsi que celle de sous-titrer les films qui sortent au cinéma en France est en vigueur depuis la loi Handicap de 2005.

Mais il a fallu attendre 2011 pour que sorte la Charte relative à la qualité du sous-titrage à destination des personnes sourdes ou malentendantes, un texte juridique visant justement à garantir une qualité du sous-titrage grâce à des normes précises que les sous-titreurs ont à suivre.

Depuis 2011, d’autres règles non présentes dans la Charte se sont rajoutées à notre pratique pour couvrir certaines zones d’ombre, comme par exemple l’utilisation de l’astérisque “*” pour indiquer qu’une voix sort d’un appareil (télévision, téléphone, haut-parleur etc.).

Lire la charte

Particularités

Des sous-titres avec des couleurs

C’est peut-être la plus grande particularité du sous-titrage SME par rapport aux autres types de sous-titrage utilisés en France (simple, SDH, VOST et réseaux sociaux).

A noter qu'il existe d’autre types de sous-titrage avec des couleurs mais qu'ils ne sont pas utilisés en France, comme le sous-titrage SME britannique qui comporte aussi des couleurs mais qui n’ont pas du tout les mêmes significations que notre sous-titrage SME français !

Et justement, en parlant des significations, c'est ce à quoi servent les codes couleurs.

En ayant chacune une signification, les couleurs permettent d'indiquer visuellement une ou plusieurs informations sans avoir besoin de les noter explicitement à l'écran.

Voici les différentes significations, telles que notées dans la fameuse Charte :

  • Blanc : locuteur visible à l’écran (même partiellement) ;
  • Jaune : locuteur non visible à l’écran (hors champ) ;
  • Rouge : indications sonores ;
  • Magenta : indications musicales et paroles des chansons ;
  • Cyan : pensées d’un personnage ou d’un narrateur dans une fiction, commentaires en voix hors champ
  • Vert : pour indiquer l’emploi d’une langue étrangère

Grâce aux couleurs on peut par exemple indiquer simplement quelque chose sans avoir à le noter, comme dans cet exemple où l’on aurait une présentatrice dans un reportage :

Sous-titre d’un reportage France 3 “-[présentatrice] 20 ans après la loi Handicap du 11 février 2005

Sous-titre du même passage : “-20 ans après la loi Handicap du 11 février 2005” en cyan

Ce qui nous aide en lisibilité et en confort de visionnage !

Bon, quand on sous-titre, on sait qu’on a des tas de cas particuliers qui peuvent se poser, et d'autres règles se sont ajoutées avec la pratique. Notamment, comment rédiger correctement des indications sonores (que l’on doit donc mettre en rouge, si vous avez suivi 😉)

A noter également qu’un sous-titrage SME aux normes a toujours ce qu’on appelle un boxing, c’est-à-dire un petit fond noir derrière les sous-titres pour que les couleurs soient toujours bien contrastées avec le fond et qu'ainsi les personnes en situation de surdicécité ou qui ont simplement une fatigue visuelle ne soient pas gênées.

Si vous souhaitez devenir pro du sous-titrage SME, il fait partie de ma formation complète au sous-titrage, durant laquelle on voit tous les différents types de sous-titrage et leurs spécificités.

Lire la page dédiée (lien)

Des positionnements différents

La difficulté qui se pose quand on a plusieurs personnages qui parlent à l’écran ou hors-champ, c’est de discerner qui parle à quel moment.

Les entendants se réfèrent à la voix de la personne, que l’on va reconnaître. Si on ne la reconnaît pas, on distingue au moins que la voix est différente d’une autre, ce qui fait que l’on sait que ce n’est plus la même personne qui parle.

Puisque l’on sous-titre ici pour les personnes sourdes et malentendantes, on va utiliser un procédé de sous-titrage pour indiquer qui parle à quel moment.

Mon petit chouchou, très pratique, est le tiret. En mettant un tiret à chaque changement de locuteur, on peut savoir qu’un discours est découpé entre plusieurs locuteurs.

Mais le sous-titrage SME nous invite à aller encore plus loin en nous faisant utiliser les positionnements des sous-titres.

On va pouvoir aligner notre sous-titre à droite, à gauche ou au centre selon la position du personnage qui parle à l’écran.

Sous-titre d’un passage différent, en blanc aligné à gauche sous la personne qui parle : une jeune femme blonde. “Les aidants peuvent y être formés pour aider leurs proches.”

Un sous-titrage universel ?

Est-ce que ces normes s’appliquent quelque soit la langue dans laquelle on sous-titre ? Malheureusement, non.

Chaque pays a son propre sous-titrage type Sourd et Malentendant, ce serait sans doute trop simple sinon…

Et d’ailleurs, vous avez sans doute rencontré le sous-titrage type Sourd et Malentendant américain, le sous-titrage SDH (Subtitles for the Deaf and Hard of hearing) que l’on peut trouver sur les plateformes de streaming américaines même en France, type Netflix ou Amazon Prime video.

Ce sous-titrage est tout en blanc, il n’a donc pas de couleurs, ce qui fait qu’il est de manière générale moins précis que le sous-titrage SME, car on va utiliser les mêmes paramètres pour indiquer différentes choses.

Par exemple, on va indiquer les chansons et les sons entre crochets en SDH, tandis qu’en SME, on mettra les musiques en magenta et les sons en rouge.

Sous-titre du même reportage en SME, en rouge “Dialogues indistincts”, en cyan “6 millions de Français”.

Sous-titre du même passage en SDH, en blanc et entre crochets “dialogues indistincts”, tiret 6 millions de Français

Il a par contre l’intérêt d’être international et de “passer” sur toutes les plateformes, même celles qui ne détectent pas les couleurs.

Comment faire du sous-titrage SME ?

Un sous-titrage qui se réalise sur un logiciel de sous-titrage

Pour être sûrs de respecter toutes les normes en vigueur, nous avons besoin d’un logiciel de sous-titrage très précis et professionnel qui nous indique par exemple :

  • les caractères par seconde
  • les caractères par ligne
  • le nombre d’images entre les sous-titres
  • les changements de plan

ce qui n’est pas le cas sur un logiciel de montage ou autre.

Toutes ces indications nous sont très utiles pour respecter les règles des temps d'affichage à l'écran, afin de faire en sorte que les personnes aient suffisamment le temps de lire nos sous-titres et que la vitesse de lecture n'impacte pas leur expérience.

Il nous permet également de sortir des fichiers de sous-titres en différents formats qui supportent les couleurs (.stl ou .vtt par exemple) qui pourront être ensuite intégrés à la plateforme sur laquelle sera diffusée la vidéo.

Pour ma part, j’utilise surtout Subtitle Edit (le logiciel que j’enseigne pendant ma formation) qui est gratuit et open source, fait par des sous-titreurs pour des sous-titreurs.

Il existe également d’autres logiciels de sous-titrage, comme EZTitles ou Aegisub.

Interface du logiciel Subtitle Edit avec une vidéo chargée

Comment activer les sous-titres

Si vous êtes consommateur de sous-titrage, vous vous êtes peut-être demandé pourquoi, malgré l’obligation de sous-titrer, certains programmes à la télévision ou au cinéma ne sont pas sous-titrés.

Pour la télévision, comme dit précédemment, la plupart des chaînes ont l’obligation de sous-titrer mais c’est au spectateur d’activer ou non les sous-titres. Pour cela, il faut généralement aller dans les paramètres de votre télévision ou de votre télécommande et choisir d’activer les sous-titres.

Pour le cinéma, il faut réussir à trouver des séances sous-titrées en Sous-titrage Sourd et Malentendant (et donc pas en VOST). Les séances sont généralement notées “VFST”, “VFST-SME” ou simplement “SME”.

Pour les programmes en replay ou sur des plateformes de streaming, il faut également les activer, comme sur la capture d’écran ci-dessous tirée de france.tv.

Pour voir du SME, il faut bien choisir le “français” avec soit le petit logo Sourd et Malentendant comme sur la capture d’écran, soit l’appellation “français SME”.

Capture d’écran de la plateforme de streaming france.tv, avec la fenêtre des sous-titres ouverte. L’audio français est sélectionné, ainsi que les sous-titres français avec le logo sourd et malentendant

Le sous-titrage SME sur Internet

Avec l’élargissement des obligations en matière d’accessibilité sur Internet, les entreprises et autres organisations ont de plus en plus besoin de produire des vidéos avec un sous-titrage accessible.

Comme on l’a vu, tous les types de sous-titres ne sont pas accessibles, c’est pour cela que pour être conforme, on rencontre de plus en plus le sous-titrage SME également sur Internet, là où il y a quelques années, il se rencontrait surtout à la télévision ou lors de certaines séances de cinéma.

Ces évolutions ont fait arriver de nouveaux clients pour les sous-titreurs spécialisés en sous-titrage Sourd et Malentendant.

Si après toutes ces explications, vous voulez “enfin” voir à quoi ça ressemble en version vidéo si vous n’en avez jamais vu, voici un extrait de l’édition du 19/20 de France 3 Alpes sous-titré SME par mes soins (dont sont tirées les illustrations de cet article).

Dans cet extrait, Arnaud Guillemot vous explique l’importance du sous-titrage en tant que personne concernée.

Pour conclure, le sous-titrage SME est personnellement mon petit chouchou. Même si quelques normes auraient besoin d’être un peu dépoussiérées pour s’adapter aux nouveaux contenus et aux nouvelles habitudes de consommation, il reste l’un des sous-titrages les plus précis et les plus accessibles, quand il est bien fait bien sûr !

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